Comment l'intelligence artificielle peut-elle être intégrée dans la fonction publique territoriale ?

Optimiser, mieux détecter et réaliser des tâches répétitives sont des objectifs centraux pour de nombreuses entreprises mais également dans le secteur public. L’intelligence artificielle est l’un des outils à disposition des administrations et de la fonction publique territoriale afin d’aider les dirigeants et agents au quotidien sur un grand nombre de missions.
Qu’est-ce que la fonction publique territoriale ?
On parle de fonction publique territoriale pour désigner les différents agents appartenant aux collectivités territoriales. Ces dernières recouvrent les communes, les départements et les régions mais aussi les structures intercommunales telles que les communautés de communes et les communautés d’agglomérations. Les établissements publics et les offices publics d’HLM peuvent également être considérés comme des collectivités à part entière.
En France, selon le ministère de la transformation et de la fonction publiques, il y a près de “1,915 million d'agents fonctionnaires, contractuels et emplois aidés (hors Paris)” (chiffres de 2022). Les agents de la fonction publique territoriale représente plus du tiers de l'ensemble des fonctionnaires employés par l’État.
Depuis plusieurs années, la fonction publique se modernise et évolue, notamment avec l’essor des nouvelles technologies et de l’intelligence artificielle.
Des exemples concrets d’utilisation de l’IA dans la fonction publique
L’un des principaux avantages de l’IA est qu’elle permet d’automatiser des tâches répétitives en minimisant souvent les marges d’erreur. Au service de la fonction publique territoriale, ces outils vont permettre de gagner en fiabilité et en efficacité. Il ne s’agit pas de remplacer les agents territoriaux mais de les équiper d’outils spécifiques leur facilitant les missions et d’aider à la prise de décision. Voici quelques exemples d’applications concrètes de l’IA dans les métiers de la fonction publique :
Au niveau de l’administration et de la gestion des ressources des collectivités territoriales :
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Optimiser les réponses aux citoyennes et citoyens grâce à des assistants virtuels ou chatbots pour répondre à leurs questions
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Améliorer le service aux administrés grâce à des recommandations en fonction du profil et de l’historique de la personne en train de consulter le site internet en question
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Utiliser l’IA pour détecter anomalies, documents falsifiés et même possibles cyberattaques
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Intégrer des outils d’aide à la décision comme les logiciels d’OCR par exemple, afin d’encoder automatiquement les factures ou de détecter le contenu des documents administratifs
Au niveau des villes :
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Réduction de la consommation énergétique d’un bâtiment grâce à des capteurs et à un système de centralisation
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Améliorer la circulation en utilisant des feux intelligents, des outils d’identification des zones d’embouteillages et problématiques basés notamment sur des caméras et capteurs
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Utiliser la maintenance prédictive pour les bâtiments publics, la voirie et les infrastructures
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Optimiser les systèmes de gestion de l’approvisionnement en eau
L’intelligence artificielle peut être utile dans tous les domaines de la fonction publique territoriale et s’inscrit dans la dynamique de transformation numérique de l’État. La dématérialisation des services comme les cartes grises, l’état civil ou même les impôts, permet de réduire les coûts tout en simplifiant des démarches souvent jugées fastidieuses. On pense également au recrutement dans la fonction publique qui peut bénéficier de solutions spécifiques.
Parallèlement, ces outils numériques, et plus spécifiquement les chatbots, peuvent permettre de rapprocher les citoyens vivant en zones rurales, plus éloignés des établissements de service public. Les administrés peuvent être accompagnés dans leur démarche de manière intuitive et instantanée, d’une demande de formulaire à une déclaration de vol de papier en pleine nuit.
Quels outils sont utilisés actuellement par la fonction publique ?
La fonction publique territoriale dispose de nombreuses données. L’implémentation de systèmes d’IA, nécessitant de grands volumes de data pour s’entraîner et atteindre des niveaux de performance intéressants, est donc particulièrement indiquée pour améliorer la gestion des dirigeants de la fonction publique et faciliter leur travail. Une grande partie des projets actuellement menés au sein des collectivités territoriales porte sur la gestion des données, leur structuration et leur collecte, dans le respect des règlementations en vigueur.
Actuellement, des outils basés sur l’IA appliquée à l’énergie, à l’environnement ou encore à la santé et l’éducation sont en expérimentation ou déjà en action au sein de plusieurs administrations, dont des ministères français comme le ministère de l’Environnement.
Ce dernier participe en effet, via l’Office français de la biodiversité (OFB), à la mise en oeuvre de la première carte des habitats naturels et semi-naturels sur le territoire national d’ici 2025 afin d’aider à la décision publique en matière de biodiversité. L’IGN, le CEREMA, l’Unité mixte de service Patrimoine Naturel (UMS PatriNat), l'Unité mixte de recherche Environnement-Ville-Société (EVS-ISTHME) sont également parties prenantes de cette expérimentation qui se base sur une méthode prédictive dans le cadre du programme CarHAB.
Autre exemple au sein du ministère de l’Agriculture qui a lancé le programme lAlim. La direction de l’Alimentation a accès à une IA capable d’identifier les restaurants et autres établissements de restauration pour lesquels les agents de contrôle doivent intervenir dans un court délai. Ce système scanne les notes et avis de consommateurs de Tripadvisor ou encore de Google et permet de repérer les établissements à contrôler.
En matière de fraude, l’IA est également de plus en plus utilisée. Un logiciel développé par l’administration fiscale, en collaboration avec Google, utilise des images satellites et croise les données avec les déclaration des contribuables. Ce faisant, l’outil permet de détecter les installations non-déclarées constituant une éventuelle fraude aux impôts locaux. Piscine, véranda, abri de jardin ou encore terrain de tennis, les agents de Trésor public peuvent donc procéder aux vérifications nécessaires.
À la direction générale des finances publiques (DGFiP), l’intérêt de tels outils est évident. Ils sont au coeur des actions du Bureau de la programmation des contrôles et de l’analyse des données dont l’objectif est d’améliorer le ciblage des contrôles fiscaux. Les agents sont désormais aiguillés par un logiciel capable d’exploiter exploitant toutes les bases de données à disposition de la DGFiP et de croiser les données pour établir des profils de fraude.
L’importance de la formation en intelligence artificielle
L’IA est une technologie révolutionnaire qui peut permettre d’améliorer la vie des citoyens, de détecter des erreurs et des fraudes ou encore d’optimiser la gestion pour les dirigeants de la fonction publique.
Cependant, avant de l’implémenter dans un service ou une organisation, il faut comprendre comment elle fonctionne, quels sont ses avantages et les risques qu’elle peut présenter. La sensibilisation à l’intelligence artificielle des fonctionnaires dirigeants et de leurs équipes est fondamentale avant une adoption d’outils basés sur l’IA. Ils doivent pouvoir comprendre ce qu’elle veut dire, qu’est-ce qu’elle peut leur faire gagner, quelles sont les spécificités à connaitre, etc.
La gestion d’un projet IA a des spécificités et il est impératif d’avoir des personnes formées capables de maîtriser les moyens concrets d’implémentation sur le terrain, de définir un plan d’action prenant en compte les métiers et les règles éthiques à respecter et bien évidemment de répondre aux questions des équipes.
Dématérialisation des documents, aide à la décision, détection des fraudes ou encore sécurité, l’intelligence artificielle peut aider les dirigeants de la fonction publique au quotidien. Le développement d’outils doit cependant être accompagné d’une formation, ouvert et explicable.